Loi Sapin 2 et assurance-vie : halte à la panique !

Qui a touché au placement préféré des français ? D’où vient le bouleversement qui a fait couler beaucoup d’encre ces dernières semaines ? Tout débute avec le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, appelé Sapin II, adopté par les députés le 29 septembre 2016. Le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) se voit attribuer de nouveaux pouvoirs dans un but simple et clair : « stabiliser le système financier ». Les crises systémiques inquiètent et Bercy préfère jouer l’adage « mieux vaut prévenir que guérir ».

L’écrivain et journaliste Alain Pontaut disait que «  faire des concessions, ce n’est pas lâcheté mais salut. C’est souci de conservation ». Le cœur du sujet est donc là, conserver le système en accordant certaines mesures pour en éviter l’implosion. Il ne faut pas céder à cette panique médiatique et voir cette rationalisation assurancielle comme un tremplin pour l’épargne. Explications.

  • Possibilité de restreindre les retraits sur les contrats en euro… en cas de risque systémique !

L’article 21 bis du projet de loi a fait hérisser bien des poils lors de sa divulgation. La décision de suspendre, retarder ou limiter pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrage ou le versement d’avances sur contrat peut désormais être prise par le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) en cas de danger de risque systémique. La brusque remontée des taux en serait d’ailleurs le déclencheur. Car en continuant de garantir à tout moment la liquidité aux épargnants, les compagnies d’assurance « fragiles » n’arriveraient pas à faire face à des rachats massifs. La spécificité française qu’est (qu’était ?) le fonds en euro ne pouvait pas rester un paradis pour les épargnants dans un contexte financier tel qu’aujourd’hui, où se mêlent incertitudes, volatilité et faiblesse des taux.

Cette restriction sera limitée à une durée de 3 mois renouvelables.

  • Encadrement de la rémunération des fonds en euro

Le rendement des fonds en euro est  jugé démesuré par rapport au contexte de taux très bas. Pour comprendre cette affirmation, il faut décortiquer le fonctionnement du fonds en euro. Comment les assureurs sont arrivés à délivrer des rendements intéressants tout en promettant une garantie en capital ? Les fonds en euro sont principalement investis sur des obligations d’états d’entreprises de grande qualité. Le problème, c’est que ces mêmes obligations délivrent un rendement très faible voir négatif. Par exemple, si vous souhaitiez investir sur le bund allemand (obligation allemande à 10 ans), le taux était négatif. Oui, oui, vous avez bien lu, vous prêtiez de l’argent à l’Etat allemand et celui-ci ne vous remboursait pas la totalité.

Forcément, dans ce cadre, il devient compliqué pour les assureurs de trouver du rendement. Pour autant, vous avez du apercevoir la guerre concurrentielle que ces derniers se livraient pour savoir lequel d’entre eux allait avoir la meilleur performance. Gagner 2 % et délivrer 2,5 %, kézako ? Ils puisent dans leurs réserves de plus-values accumulées par les années passées, voilà le secret. C’est à ce moment-là que le HCSF pourra moduler la faculté des assureurs à piocher dans ces fameuses réserves. Peut-être devons-nous voir dans cette « menace » la fin de la concurrence déloyale entre assureurs pour aller vers une assurance-vie plus raisonnable et au final, plus saine.

Adopté par les députés, le projet de loi doit encore être examiné par les sénateurs et certains comptent sur le Conseil Constitutionnel pour mettre le doigt sur une éventuelle atteinte au droit de propriété des épargnants.

Elodie RIVET

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